LE CARNAVAL DES SONGES
de Maryse Vaugarny et Nicolas Isabelle – 2019 – 16’33
Déambulation dans le Cahors médiéval… Un écho gothique au presque millénaire de la cathédrale.
Dimanche 6 octobre || 11h00
De Sarah Suco
France – Drame – 99’
Avec Camille Cottin, Éric Caravaca, Jean-Pierre Darroussin, Céleste Brunnquell.
AVANT-PREMIÈRE
Camille est l’aînée d’une famille de quatre enfants dont les parents se rapprochent d’une petite communauté catholique. insidieusement, cette dernière resserre les liens autour de la famille et l’adolescente voit ses repères s’ébranler, doit tricher avec ses amis, renoncer au cirque, à sa famille…
Il y a dans le combat de Camille le souvenir de celui de Suzanne Simonin, cette jeune femme enfermée au couvent et dont Diderot conte le combat dans La Religieuse. L’enfermement diffère dans sa forme, mais les échos d’une autorité de pénitence sont les mêmes, qui pervertit l’humilité en humiliation, la liberté en aliénation et la joie en une transe hébétée, le bêlement stupide et sidérant du troupeau derrière son gourou. Il peut sembler équivoque au premier abord de programmer un tel film dans un festival lié aux plaisirs ! C’est pourtant un film qui met en lumière de façon saisissante les dérives sectaires qui font leur lit des aspirations désemparées au bonheur ; leur arme de la duplicité du langage. Et puis, c’est surtout une quête de liberté. Un film de résistance, celle d’une adolescente qui se bat dans le brouillard moral qui estompe tous ses repères, mais sent toujours des petites flammes qui la guident à l’aveuglette : la rencontre de Boris, le désir de faire le clown, désir qu’un Darroussin, en prêtre de mauvaise foi, voudrait étouffer en elle – comme Frère Jorge vitupère contre le rire libérateur dans Le Nom de la rose – et enfin ses frères et soeur. Retrouver un bonheur à soi et la fraternité ! D’ailleurs la réalisatrice, Sarah Suco, dédie son film à ses propres frères et soeurs.
SARAH SUCO
La carrière cinématographique de Sarah Suco, actrice avant tout, prend son envol avec le rôle d’Emma dans Discount de Louis-Julien Petit, en 2014. Sarah Suco enchaîne alors les rôles importants, dans L’Enquête de Gilles Lellouche en 2015 et se révèle au grand public l’année suivante dans Joséphine s’arrondit. L’an passé, elle jouait dans le dernier film de Louis- Julien Petit, Les Invisibles. En tant que réalisatrice, Les Éblouis est son premier long métrage.
ESTATE
De Ronny Trocker 7’
ur une plage méditerranéenne ensoleillée, un homme noir, à bout de force, rampe péniblement pour quitter la plage. Autour de lui...
Dimanche 6 octobre || 14h00
De Mati Diop
France/Sénégal/Belgique – VOSTF – Drame – 105’
Avec Mama Sané, Amadou Mbow, Ibrahima Traore.
Grand Prix au Festival de Cannes 2019
Voilà trois mois que les ouvriers d’un chantier ne sont plus payés. Ils râlent, manifestent mais le patron, N’Diaye, fait l’anguille. Parmi ces ouvriers, Souleimane. Ada et lui s’aiment. Mais Ada est promise à Omar, qui rentre au pays auréolé de réussite. L’avenir semble tellement contraint, à Dakar, pour cette jeunesse. Un soir, alors qu’elle rejoint Souleimane à la paillote de son amie Fanta, Ada apprend qu’il est parti pour l’Europe, avec les autres garçons...
D’une part, il y a la ville étriquée, coincée sur sa frange littorale, la terre des vivants entravés dans les mesquineries opportunistes et la peine quoti-dienne ; d’autre part l’Atlantique, monolithe gonflé, animé par les vents, qui rythme le film de plans infi-nis, quasi cosmogoniques. Ainsi le film ouvre-t-il les pages d’une fable qui prend une dimension élé-mentaire, où l’eau, l’air et la terre combattent. Et le feu bientôt, qui embrase le mariage non désiré d’Ada, enfièvre les corps et en appelle aux Djinns qui font la police : les Possédés réclament justice au nom des Dépossédés, ouvriers bafoués, gar-çons noyés, au nom de Souleimane et Ada. Voici plus qu’un film politique sur la migration : parce qu’on reste en Afrique avec ceux qui y res-tent. Voici plus qu’un film qui s’essaierait au mélange des genres. Ainsi, ceux que l’on verra comme des « fantômes » dans le film n’ont sans doute pas grand-chose à voir avec une acception générique du terme mais bien plutôt avec une entité, une réalité africaine : « Il y a des souvenirs qui sont des présages »
MATI DIOP
Actrice et réalisatrice née en 1982 à Paris, Mati Diop est la nièce du cinéaste sénégalais Djibril Diop Mam-bety, le « Godard de Dakar ». Avec Claire Denis comme marraine en cinéma, qui lui offrira son premier rôle principal dans 35 Rhums en 2008, elle se forme d’abord au Pavillon – laboratoire de recherche artis-tique – puis au Fresnoy, studio national des arts contemporains. En 2010, Atlantiques – clairement annonciateur de son premier long métrage - obtient à Rotterdam le prix du meilleur court-métrage et en 2013 à Cannes, elle présente Mille Soleils, court-métrage documentaire sur le film Touki Bouki, de son oncle, que ce même festival avait primé en 1973. Du cinéma, son oncle disait qu’il « a la chance d’avoir l’Afrique pour penser au futur ». Il semble qu’il rêvait déjà à sa nièce !
TURBOPÉRA
De Antoine Marchand, Fabien Meyran, Benoît de Geyer d’Orth 2’
Dans une poissonnerie, deux solistes interprètent avec émotion La Traviata de Verdi...
Dimanche 6 octobre || 16h30
De Alla Kovgan
France – Allemagne / VOSTF – Documentaire musical
Film présenté par Susan Paddon : Diplômée de la Juilliard School, Susan Paddon fut 10 années durant danseuse professionnelle à New-York, où elle a notamment suivi des cours avec Merce Cunningham. Arrivée en Occitanie en 2007, elle anime des ateliers de danse. Elle est présidente de l’Association Faits et Gestes, à Cazals.
AVANT-PREMIÈRE
Sur trois décennies, jusqu’en 1972, le film nous plonge dans l’univers et le parcours de celui qui aimait à se définir simplement comme danseur. Depuis les archives jusqu’aux « traces contemporaines » de ses créations…
Bien sûr, le film est un documentaire. On suit ainsi le fil de l’incarnation de la méditation de Merce Cunningham – plus que de sa pensée : car c’est le mouvement et ce sont les corps qui s’expri-ment à travers les archives, où la voix off libère l’image des discours et laisse la part belle à la danse et aux rencontres fructueuses avec ces artistes visionnaires que sont John Cage, Robert Rauschenberg ou Andy Warhol. Longtemps le danseur fut mal compris. Mais sa quête d’une danse absolue, indépendante des accessoires réducteurs qu’étaient pour lui la musique et le décor, a débouché sur sa rencontre avec John Cage, sur une nouvelle alliance avec une musique non mélodique, déconcertante, ouvrant aux danseurs non plus une ligne conductrice mais un volume sonore libéré. Voilà où le film de Kovgan prend sa pleine dimen-sion cinématographique : dans la façon dont la réalisatrice pose sa caméra et définit son cadre pour rendre compte de l’espace perçu par Merce Cunningham. Un espace original où la danse a plus affaire avec la peinture qu’avec la musique : « Merce est un peintre et nous ses couleurs ». Une danse picturale, qui rappelle Matisse plus d’une fois, et que la lumière – pas les éclairages – mag-nifie de façon spectaculaire. En tout cas, voici un film envoûtant, à la suite duquel chacun comprend définitivement Cun-ningham, dont la quête ambitieuse se résume ainsi simplement : chercher « cette posture spon-tanée qu’un chat peut nous donner ».
ALLA KOVGAN
Installée à Boston, Alla Kovgan est née à Moscou en 1973. Depuis 1999, elle travaille avec la Kinodance Company sur des projets interdisciplinaires danse & cinéma, œuvrant notamment dans le cadre du Dance Film Festival de Saint-Pétersbourg. Elle a par exemple co-réalisé Nora, qui suit le retour du danseur, Nora Chipaumire, dans son Zimbabwe natal.
Dimanche 6 octobre || 19h00
De Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles
Brésil – 2019 – VOSTF – Thriller/western – 132’
Avec Barbara Colen, Sônia Braga, Udo Kier, Wilson Rabello, Karine Teles, Silvero Pereira.
Interdit aux moins de 12 ans avec avertissement
Prix du jury ex-æquo au Festival de Cannes 2019
Teresa rentre enterrer sa grand-mère, la matriarche de Bacurau, petit village du sertão brésilien. La communauté qui vit là est pauvre, mais elle semble paisible. Pourtant, on sent encore les traces de la lutte contre le barrage, le vol de l’eau, et très vite, incidemment, des faits étranges inquiètent les habitants. Quand le père de Teresa, l’instituteur, essaye de faire repérer Bacurau à ses élèves, sur Google Earth, le village a disparu...
Officiellement, l’histoire se passe dans un futur proche. En tenant compte de l’actualité bré-silienne et des craintes soulevées par la gouver-nance de Bolsonaro, il s’agit alors d’un futur immédiat. la sortie du film au Brésil ne manquera sans doute pas d’alimenter le débat : il est un véritable appel à la résistance ! Mais le film impressionne par ailleurs. Il a, par exemple, la capacité à créer une atmosphère fan-tastique, nourrie des singularités du sertão, un lien déroutant avec une nature austère – le Far West sud-américain – un lien proche du chama-nisme, de la magie. Et si un environnement aussi cru implique forcément la cruauté, le film évite le genre strictement horrifique par des accents bur-lesques qui, s’ils ne tempèrent pas la violence, la nourrissent d’un sens décalé, un peu irréel. C’est notre sourire, alors, qui nous soulage.On pense à John Carpenter, à Tarantino, dans ce film : à cette capacité à recréer un genre, le wes-tern, qui tisse avec le spectateur, au-delà de la violence du contexte, une complicité, une recon-naissance, le partage d’une culture commune du cinéma.
KLEBER MENDONÇA FILHO
Né en 1968 à Recife, il est d’abord critique de cinéma. Réalisateur de plusieurs courts-métrages, souvent expérimentaux, il est remarqué dès son premier long métrage, Les Bruits de Recife, en 2012. En 2016, il a réalisé Aquarius. C’est la troisième fois que Ciné+ sélectionne une de ses œuvres.
JULIANO DORNELLES
Né en 1980, Juliano Dornelles est directeur artistique et décorateur. C’est par ce biais qu’il a collaboré aux premiers films de Kleber Mendonça Filho. Bacurau est sa première réalisation.